CRÉATION 2018
Mise en scène et interprétation : Mireille HUCHON
Création lumière, son, vidéo : Pierre BIRBA
Il s’agit ici de la description chirurgicale d’une photo reportage des énnées 50. Cette lecture photographique, que l’auteur Virginie Thirion réussit parfaitement, provoque chez l’interprète, Mireille Huchon, un parcours émotionnel qu’elle partage avec son auditoire.
Le sentiment d’être fasciné, complice, pris en otage par l’image, grandit tout le long de la performance et donne tout l’intérêt à cette expérience….
Pour le public fidèle aux festivals de photo reportage ou de photo tout court, comme pour tous les publics, ce spectacle est un bienfait et une ouverture sur le monde de l’image.
NOTES DE MISE EN SCÈNE
Tout d'abord, j'ai voulu retranscrire sur la scène le phénomène de curiosité grandissante que subit le lecteur en parcourant le livre. En effet, durant la lecture de ce texte, on éprouve une irrésistible envie de revenir sans arrêt vérifier les dires de l'auteur par rapport à la photo, qui représente une exécution sommaire dans une rue en Chine dans les années 50.
On se surprend à n'avoir été attentif qu'à l'impact de l'image dans son ensemble. Un sentiment de frustration naît alors dans la tête du lecteur de ne pas se rappeler les détails de la photo évoqués par l'auteur. C'est ainsi que l'on se retrouve à tourner et retourner des pages écrites à la page de la photographie, qui se situe derrière la page de couverture.
Puis j'ai voulu donner une dimension plastique entre celui qui voit - en l'occurrence le photographe, les spectateurs, nous - et ce qui est vu, c'est à dire la scène de l'exécution.
La frontière entre celui qui voit et ce qui est vu est très virtuelle car c'est le cliché qui nous révèle. Notre présence invisible sur la photo se matérialise dans nos têtes de curieux. Nous faisons donc partie de la photo, comme pris en otages, d'où la culpabilité du personnage, témoignant son trouble.
Ainsi, la position dramatique va se jouer entre les mots du texte et le va-et-vient de la projection de la photo de guerre. Cette photo sera travaillée en direct pour exprimer ou appuyer les émotions venant de la dramaturgie du texte. Par le fait, on infligera à cette photo des effets visuels pour amener le public à vivre les sentiments en même temps que l'interprète sur la scène. Ces effets devront être sobres pour ne pas devenir une performance vidéo en direct.
Le comédien parlera parfois dans un micro pour que la voix sonorisée participe à la création du vivant et casse la monotonie de la lecture analytique de la photo. Ce travail de son et de variation vocale mettra en valeur la description chirurgicale que l'auteur réussit parfaitement. La photo, disséquée par les mots de Virginie Thirion, deviendra à nos yeux "notre" photo.
L'émotion grandissante de ne pouvoir tout saisir avec son œil et pourtant d'en ressentir l'horreur sans comprendre pourquoi sera le noyau dur de cette performance. Ce sera le point-ressource pour l'interprétation du texte. L'obsession de ne pouvoir regarder qu'un endroit de la photographie mettra mal à l'aise le personnage.
La scénographie restera sobre :
1) les rideaux de théâtre encadrant le cyclorama nous rappelleront à l'idée que le lieu de l'exécution, en l'occurrence la rue, n'est rien d'autre qu'un théâtre et l'exécution, une mise en scène,
2) les trois pupitres éclairants où se dira le texte se placeront dans l'espace comme points de vue du photographe,
3) le fauteuil sera le lieu de lâcher-prise du personnage.
Le matériel technique (vidéo-projecteur, câbles, table de mixage) restera à vu pour garder la transparence des effets scéniques et visuels, pour montrer que ce que le spectateur voit est un effet voulu en interaction avec l'acteur, et que l'on n'a rien à cacher.
Mireille Huchon, metteur en scène et interprète
________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________________